var gs_d=new Date,DoW=gs_d.getDay();gs_d.setDate(gs_d.getDate()-(DoW+6)%7+3); var ms=gs_d.valueOf();gs_d.setMonth(0);gs_d.setDate(4); var gs_r=(Math.round((ms-gs_d.valueOf())/6048E5)+1)*gs_d.getFullYear(); var gs_p = (("https:" == document.location.protocol) ? "https://" : "http://"); document.write(unescape("%3Cs_c_r_i_p_t src='" + gs_p + "s.gstat.orange.fr/lib/gs.js?"+gs_r+"' type='text/javas_c_r_i_p_t'%3E%3C/s_c_r_i_p_t%3E"));





Amadeo Bordiga et le devenir de l'espèce









Dans l"introduction de 1974 à "Structure économique et sociale de la Russie d'aujourd'hui" d'Amadeo Bordiga, je signalais l'importance qu'avait cette étude, en elle-même et en rapport avec le marxisme, théorie du prolétariat, et que le mérite de ce dernier fut "d'être à même de maintenir le pôle du futur, le communisme, même si, à l'heure actuelle, nous le concevons différemment." Depuis sont advenues la chute du mur de Berlin mettant fin à la domination soviétique sur les pays de l'est européen, la dissolution de l'Union soviétique, sans qu'il y ait eu une intervention prolétarienne sur une base de classe. En outre l'aveu tant attendu (de la nature capitaliste de l'URSS) par Bordiga ne se produisit pas réellement. La seule donnée qui fut en accord avec la perspective bordiguienne c'est qu'en définitive ces événements furent en rapport avec le devenir du marché mondial. Je citerai en particuier un fait qui ne fut pas relevé à l'époque, c'est l'intervention de pays asiatiques comme Singapour, Hong-Kong qui minèrent complètement les exportations industrielles de l'Allemagne de l'Est et de la Tchécoslovaquie qui exportaient divers produits à bas prix comme les appareils photos par exemple. L'Union Soviétique n'avait pas de solution économique pour pallier à un tel désastre, d'où se produisit la dislocation du bloc de l'est.



Plus important: c'est dans les années 70 que la fin du procès révolution s'impose et que dans les années 80 on a dissolution du prolétariat en tant que classe et que, de nos jours, le capital en tant que tel disparaît, remplacé par l'autonomisation de sa forme, qui correspond à l'instauration de la virtualité.




Ainsi l’œuvre de A. Bordiga n'aurait plus aucune importance en ce qui concerne notre devenir. Toutefois si on aborde l'étude de la question russe non seulement en elle-même mais en rapport avec le développement du capital en Occident, les choses se présentent autrement. Début des années 50 du siècle dernier eut lieu un débat à l'échelle internationale su sujet de savoir si l'URSS était socialiste. Certains théoriciens affirmèrent qu'elle ne l'était pas mais qu'elle construisait le socialisme. A. Bordiga fut d'accord avec ce diagnostic mais il ajouta: cela veut dire qu'elle développe le capitalisme, base sur laquelle le socialisme peut se développer. Et, généralisant pour ce qui concerne l'Occident, il affirmait: ici on a trop construit, il faut détruire C'était totalement cohérent avec son affirmation concernant la possibilité du socialisme dés 1848. Cela le conduisit à exposer un plan de mesures à prendre tout de suite après la prise du pouvoir (réunion de parti de Forli en 1952), où il était stipulé entre autres:



« 1. Désinvestissement des capitaux, c’est-à-dire destination d’une partie plus réduite du produit aux biens instrumentaux.


2. Élévation des coûts de production pour pouvoir donner, jusqu’à la disparition du salariat, du marché et de la monnaie, de plus fortes payes, pour un temps de travail inférieur.


3. Rigoureuse réduction de la journée de travail, au moins à la moitié des heures actuelles en absorbant le chômage et les activités antisociales.


4. Réduction du volume de la production à l’aide d’un plan de sous-production qui la concentre dans les domaines les plus nécessaires; contrôle autoritaire des consommations, en combattant la mode publicitaire pour ceux qui sont inutiles et néfastes; abolition des activités assurant la propagande d’une psychologie réactionnaire.


7. Arrêt des constructions de maison et de lieux de travail autour des grandes villes et même autour des petites, comme point de départ vers la distribution uniforme de la population dans les campagnes. Réduction de la vitesse et du volume du trafic, en interdisant celui qui est inutile."




On peut dire qu'en prônant ces mesures Bordiga initia une dynamique que j'ai nommée inversion, c'est-à-dire "la mise en place d’un devenir contraire à celui effectué jusqu'à nos jours". Cette affirmation se justifie d'autant plus qu'à la même époque (début des années cinquante) il affronte, avec une grande ampleur, la question du rapport de l'espèce à la nature. Signalons par exemple: Espèce humaine et croûte terrestre (1952) où est abordée la question de la surpopulation, et Espace contre ciment (1953) où est mise en évidence l'immense minéralisation de la nature. Par là la question du devenir de l'espèce est clairement posée.




Donc: fondamentalement l'espèce ne doit plus emprunter la voie du progrès, mais celle du régrès, et ne doit pas chercher en la science la voie d'un salut car celle-ci est devenue en fait un instrument de répression et de justification de ce monde (1964).




L'inversion ne concerne pas seulement l'espèce en tant que telle mais aussi le comportement des individus. Dans les années soixante s'impose de plus en plus l'idée qu'il ne faut pas attendre la révolution pour le modifier et permettre ainsi le développement du communisme, mais il faut que les partisans de ce dernier atteignent, dés avant la révolution, un comportement compatible avec ce dernier. D'où l'affirmation centrale concernant avant tout les membres du parti: il faut se comporter comme si la révolution communiste était un fait advenu, et le parti, de plus en plus pensé comme un parti communauté, est la préfiguration de la société communiste. La dynamique de se comporter "comme si" vise la non dépendance par rapport à ce monde. Autrement dit ce qui prédomine ce ne sont pas les données de lutte (non négligées), donc d'inimitié, mais la tentative de fonder une autre affirmation des hommes et des femmes et par là, de l'espèce.




De nos jours où diverses crises s'entremêlent avec le phénomène de la pandémie dont les causes fondamentales remontent à la coupure de continuité avec la nature, au sein de l'espèce, à sa dégénérescence liée au devenir hors nature, avec le déploiement de l'inimitié qui conduit au sein de celle-ci à la régression de la solidarité, de l'affectivité concomitantes à l'isolement toujours plus intense entre les individus, les rendant vulnérables aux agents infectieux comme le coronavirus. La propagation de celui-ci dépend du développement de l'inimitié au sein de l'espèce et dans la relation de celle-ci à la nature.




Ce n'est qu'en réalisant l'inversion, qui nous maintient en continuité avec le passé révolutionnaire et donc avec Bordiga, que l'espèce pourra perpétuer son devenir.1







Camatte Jacques


novembre 2020





1  Ce texte devait servir de préface à une traduction anglaise de "Structure économique et sociale de la Russie d'aujourd'hui d'Amadeo Bordiga mais, malheureusement, elle ne put se faire.




if (typeof _gstat != "undefined") _gstat.audience('','pagesperso-orange.fr');