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LE COMMUNISME, L'URSS ET LA FAIM







    La révolution socialiste ne peut avoir lieu que si les forces productives ont atteint un certain degré de développement. Ce stade est historiquement atteint, dans l'aire occidentale, depuis 1848. La révolution est donc possible depuis cette époque. Mais prendre le pouvoir, prendre la direction de la société est une chose, parvenir au Communisme intégral, comme le déclare Krouchtchev au XXI° Congrès (l'URSS entre dans la période de l'édification concrète du Communisme1) en est une autre. Cela suppose, d'une part la destruction, à l'échelle internationale, de toutes les possibilités de retour du capitalisme, de l'autre, une augmentation de la production dans le domaine des biens de consommation afin de réaliser la fameuse formule :

    « De chacun selon ses capacités à chacun selon ses besoins ».



    Jusque-là, la lutte de l'homme est une lutte individuelle pour se nourrir. Travailler, c'est reproduire sa vie matérielle. Avec l'avènement de cette forme de production la Société prend en charge la vie matérielle des hommes : abolition du travail nécessaire. Tout le reste est du sur-travail. Plus précisément, l'homme individuel devenu l'homme social produit pour la joie de produire car c'est dans cette activité qu'il affirme sa nature humaine.



    Si l'URSS passe actuellement du socialisme déjà réalisé au stade supérieur du communisme, comme ses chefs le prétendent, les stigmates de la société capitaliste devraient disparaître en Russie et l'art, la littérature, le cinéma, toutes les superstructures devraient être le reflet de ce changement. Or, que ces soient les derniers films comme Quand passent les cigognes, les romans comme Le docteur Jivago, Les frères Ierchov de Kotchetov, toutes ces expressions de la réalité sociale russe reproduisent les mêmes préoccupations, les mêmes thèmes que ceux de notre enfer capitaliste : le désespoir et la satire des parvenus, ou bien les leçons de morale sur les bons et mauvais ouvriers, les difficultés de compréhension réciproque entre eux et les intellectuels. En somme les succès du cinéma russe et les best-sellers de la littérature soviétique nous offrent une substance identique à celle de la culture bourgeoise de l'Occident2.



     C'est dans l'infrastructure que nous trouverons l'explication de cette analogie, même si, pour des raisons de place, nous devons nous limiter au domaine de l'agriculture, d'ailleurs le plus révélateur à nos yeux. Si nous y rencontrons des phénomènes identiques à ceux du capitalisme de l'Ouest, nous comprendrons que la même similitude doive se manifester dans la superstructure sociale et dans ses expressions littéraires et artistiques. Ouvrons une revue stalinienne et nous serons vite renseignés :


    « Le grand mérite du Parti Communiste, au cours de ces dernières années, fut de découvrir que l'ensemble des problèmes de l'agriculture ne pouvait être résolu que si l'on commençait par résoudre le problème du grain. De 1949 à 1953, les récoltes de céréales en URSS ne couvraient plus les besoins de l’État. Déjà, avant la guerre le chiffre de 7 à 8 milliards de pouds (115 à 131 millions de tonnes) était considéré comme l'objectif à atteindre, qui devait couvrir largement tous les besoins de la consommation et de l’État. Au XIX° Congrès du Parti Communiste, G. Malenkov annonçait que le chiffre de 8 milliards de pouds était atteint. Mais c'était absolument faux. En réalité, de 1949 à 1953, la récolte moyenne était à peine supérieure à la récolte de la Russie tsariste »3.



     Si Malenkov a menti, qui nous dit que ses censeurs ne mentent pas encore lorsqu'ils nous donnent les chiffres pour 1958 ? En rejetant sur celui-ci la responsabilité de toute la « direction collégiale », en faisant grief à lui seul d'un mensonge collectif, ils retrouvent une virginité qui leur permet de « relancer le bluffé un certain nombre de fois.



    Ils confessent qu'en 1953, année défavorable, la production de céréales était au même niveau que celle de 1913, c'est-à-dire qu'aucune amélioration ne s'était produite en passant de la production féodale-bourgeoise-patriarcale à l'agriculture « socialiste ». Bien plus, en tenant compte de l'augmentation de la population, il y eut une baisse de la production par habitant. Au lieu d'en tirer la juste conclusion selon Marx et Lénine (que nous formulerons ainsi : la forme de production agraire mercantile-petite-bourgeoise, c'est-à-dire kolkhosienne-populiste, marque un recul même par rapport au servage), ils retournent à leur dada habituel : montrer qu'il y a eu une forte augmentation de la production agricole et ce, grâce aux nouvelles mesures appliquées en dépit de « l'opposition du groupe anti-parti ». Il est bien entendu facile de faire ressortir que la production de 1958 (8 milliards de pouds4 soit, 1.365 millions de quintaux) marque une très nette augmentation quand on la compare à celle de 1953 (819 millions de quintaux) année défavorable.



     En tenant compte de ces nouvelles données, nous pouvons indiquer la production de céréales de 1950 à 1958 et la comparer à celle de 1913.



    En millions de quintaux :



1913 : 801 1954 : 845

1950 : 811 1955 : 1.045

1951 : 806 1956 : 1.280

1952 : 918 1957 : 1.050

1953 : 819 1958 : 1.365



     Dans l'économie marxiste la production de blé est une donnée fondamentale : c'est d'elle que dépend l'alimentation de base des masses prolétariennes. Les critiques bourgeois du marxisme ont exalté – pour pouvoir affirmer que notre théorie était infirmée – l'élévation du niveau de vie des peuples du Nord capitaliste qui, au lieu de pain, mangent du saucisson et des produits de conserve. Que peuvent dire alors ces mêmes critiques quand, dans le pays du socialisme et maintenant du communisme, le prolétariat est encore en lutte pour une ration de pain vitale ? Rien puisque l'affirmation est dans les faits.



     Le prolétariat russe lutte contre la faim ! En effet, l'armée de travail est passée, selon les statistiques officielles, de 36 millions en 1913 à 87 millions en 1955. Or si l'on considère que la production céréalière est consommée par celle-ci nous avons un indice par habitant qui passe de 22 environ à 15,7 environ. Nous ne tenons pas compte de l'augmentation de population entre 1955 et 1958.



     On sait que le communisme, selon ses faux disciples de Moscou, n'est plus le fruit de la lutte révolutionnaire du prolétariat mondial mais de l'émulation entre l'Est et l'Ouest. Tandis que toute l'opinion se laisse bercer par ce ronronnant rabâchage d'un socialisme « sans douleur » personne ne songe à se demander si cette « voie » n'est pas, en définitive, la plus terrible, pour les Russes comme pour toute la société. En effet, si, par une hypothèse absurde, le communisme pouvait s'instaurer à la suite d'une démonstration pacifique de ses mérites, si les grands pays de l'Occident capitaliste pouvaient s'y convertir grâce à l'exemple russe, cette imitation devrait être le fait du monde de l'Ouest copiant la Russie et non vice-versa. Non seulement le pays-pilote du socialisme, l'URSS se met à plagier servilement la civilisation américaine mais, en accord parfait avec la doctrine stalinienne révisée et complétée par Krouchtchev, chacun des pays du camp « socialiste » a le droit de « rattraper » qui lui plaît dans le camp adversaire : l'URSS a pris les USA pour point de mire mais la Chine a choisi la Grande-Bretagne.



     Certes, on nous dira : ne soyez pas dogmatiques, vous verrez que nous rattraperons les USA dans le domaine agraire, c'est la tâche actuelle du socialisme. Vous voulez rattraper l'agriculture d'un pays capitaliste ! Mais Marx a dit que le mode de production capitaliste a tendance à faire diminuer la quantité de denrées alimentaires et celle des objets de consommation (par contre, il augmente celle des produits manufacturés). Prenons un exemple qui le prouvera. Aux USA, car nous ne pouvions mieux choisir, le nombre de vaches par habitant n'a cessé de diminuer depuis la fin du siècle dernier. L'indice en est tombé à 0,24 en 1880 à 0,19 en 1955, soit une diminution de 21 %. Nous avons pris l'exemple des vaches pour éviter une critique facile qui consiste à dire que la diminution des bêtes de labour est liée à la mécanisation de l'agriculture, ce qui est vrai. Qu'importe Marx, nous répondra-t-on, nous rattraperons l'Amérique.



     Le capitalisme tend à affamer l'humanité. Prolétaires, l'objectif qu'on vous assigne est celui de l'enfer capitaliste. Son point d'arrivée ne peut être le Communisme intégral, n'est-il pas aussi sûrement la Faim Intégrale ?





1  Cité dans « Le Monde » du 28.1.59



Au XXI° Congrès du P.C. Russe, Krouchtchev n'a pas manqué de stigmatiser indirectement ce pessimisme littéraire lorsqu'il recommanda aux militants de « ne pas sous-estimer le tort que cause l'influence bourgeoise à la jeunesse ».



3   « Économie et politique », n° 4, Janvier 1959, p. 59



4  Cité dans un article de « La Pravda », reproduit dans le n° 581 de la revue « Problèmes Économiques », 17.2.1959





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