PRÉSENTATION
C’est au contraire un sort enviable
d’être les premiers à entrer vivants dans la vie nouvelle; ce sera le nôtre . Karl Marx[1]
Par ce mot, je veux
signaler le désir de réaliser une présence à moi-même, à l’œuvre que je
produis, aux lecteurs et, dans la mesure où, potentiellement, tout homme, toute
femme, est simultanément individualité et Gemeinwesen, à la Gemeinwesen – la
communauté des hommes et des femmes perçue dans l’espace-temps, dans la durée.
Cette présentation est
une émergence.
Bien que les matériaux
fussent prêts bien auparavant, Invariance
n’a commencé à paraître qu’en 1968. Il y a trente ans. Depuis lors notre
cheminement intègre une réflexion permanente sur le sens et l’importance des
événements qui se déroulèrent cette année-là. C’est une des raisons pour
lesquelles je publie Mai-Juin 1968 et le
soulèvement contre la domestication. Cet article sera assez long
( j’emploie le futur parce qu’il n’est pas encore terminé ). Il
comportera outre ce qui est présentement publié, la suite de l’exposé sur
l’œuvre de Sigmund Freud, un aperçu sur celle des théoriciens dissidents,
Alfred Adler, Carl Gustav Jung, Otto Rank, ou plus ou moins en rupture comme S.
Ferenczi, ainsi que des remarques diverses sur le freudo-marxisme par exemple; ce
sera suivi d’un exposé succinct sur le développement du mouvement
psychanalytique. Ensuite les thèmes suivants seront abordés : la levée du
verrou avec le mouvement de mai-juin 1968; dissolution : dynamique
d’émergence et dynamique de virtualisation. En ce qui concerne la première, il
sera montré comment la mise en cause de l’œuvre post-théorie de la séduction de
Freud, conjuguée avec la découverte de l’importance de la répression sur les
enfants, couplée avec celle de leurs capacités qui leur furent niées, tend à
reproduire un phénomène qui se développa il y a environ deux mille avec la
prédication de Jésus, qui ne fut que l’expression individuelle d’une remise en
cause collective, radicale, à l’échelle au moins d’une aire géo-sociale donnée,
d’une dynamique de vie aberrante Dés lors, s’impose à nous d’aller jusqu’au
bout du rejet de cette dernière, en empruntant un cheminement d’émergence. On
terminera avec : précisions sur la dynamique d’émergence.
Ce article sera complété
par un autre de nature plus théorique qui permettra d’expliciter certaines
affirmations du précédent et de fonder de façon plus cohérente et radicale
notre dynamique. Il s’intitulera Advenir
et se présentera, en particulier, comme le complémentaire de Ce monde qu’il faut quitter, 1974.
J’aurai pu lui donner comme titre Cet
être qu’il faut quitter, mais cela n’aurait pas traduit parfaitement le but
de notre investigation. Il ne s’agit pas simplement d’abandonner un être donné,
la dynamique même de l’être, mais il faut émerger. Ceci est déterminant pour ne
pas répéter ce qui advint avec la répression et la récupération du mouvement
qui adopta les thèmes exposés par Jésus. Pour illustrer et compléter ces deux
articles, j’en publierai un certain nombre d’autres et l’ensemble formera un tout
indissociable. Cela m’évitera de faire des notes qui seraient trop longues.
Voici quelques titres : Rejouement
et superstition; Sexualité et mystification où certaines thèses avancées
dans l’article paraissant dans ce n° seront reprises afin de leur donner une
ample assise théorique; Freud et la
judéité qui sera peut-être doublé par une étude sur le rapport Freud-Moïse; Totem et tabou et le moment fondateur où
sera exposée la thèse selon laquelle l’interdit originel est celui de la
continuité avec le reste de la nature; l’interdit de l’inceste sous ses deux
formes, alimentaire et sexuelle, n’ait qu’un rejouement. Rejouement qu’on
pourra voir à nouveau opérer avec la formation de l’État sous sa première
forme, avec le développement des castes, des classes, etc.
Entrant également dans le
tout indissociable il y aura Freud et la
mystification : la déchirure escamotée. Étant donnée la centralité de
l’œuvre de ce dernier, il est très important de voir où se situe la racine de
la mystification dont il fut l’objet. Pour atteindre ce but il faudra utiliser
non seulement le maximum de son œuvre, mais aussi les données de sa vie.
L’investigation de nature analytique mais aussi synthétique sera l’occasion de
vérifier, pour ainsi dire concrètement, la validité des thèses avancées dans
les deux articles fondamentaux.
A partir de là, la
reprise de la rédaction de Émergence de
Homo Gemeinwesen – en intégrant ce qui a été produit depuis l’interruption
de sa publication ( ce qui est rédigé va plus loin que ce qui a été publié )
– sera possible. Il en sera de même pour les Gloses en marge d’une réalité.
Je dois préciser que
certaines questions seront seulement abordées, par suite de l’insuffisance des
connaissances de l’auteur, particulièrement en physique-chimie et en mathématiques,
ce qui n’implique nullement qu’elles soient pleinement suffisantes en d’autres
domaines. Il faut prévoir plusieurs années pour mener à terme ce programme. Si
je tiens compte, en outre, du temps nécessaire pour combler les lacunes
sus-mentionnées, il en faudra alors une quarantaine pour en venir à bout. Je
verrai, nous verrons. L’essentiel c’est émerger, parce que se fait jour le
possible d’une réelle émergence, au bout d’une millénaire errance.
Émerger c’est aussi se
positionner au sein d’un devenir.
CAMATTE
Jacques
Septembre
1998